5@7 H-POD sur les soignants migrants au Québec

Notre 5@7 de la santé du 6 décembre a porté sur l’enjeu des soignants migrants. Ce 5@7 est organisé par les étudiants du H-POD, sous la gouverne de Marie-Andrée Girard, doctorante en droit et anesthésiste. Cet évènement s’est voulu une discussion interdisciplinaire pour permettre d’éclairer les participants sur la réalité des soignants migrants, que nous définirons largement comme les soignants, qu’ils soient reconnus comme des professionnels ou non, qui ont eu leur formation à l’extérieur du Québec et qui viennent ou veulent pratiquer leur art au Québec. Solution à la pénurie ? Sommes-nous à même de les accueillir ? Sont-ils intégrés au système de soins actuel ? Tellement de questions possibles !

 

L’évènement s’est tenu à la Faculté de droit sous forme de table ronde pour favoriser la discussion. Les participants ont pu échanger pendant plus de 2 heures sur les trois questions suivantes :

  • Quels sont les plus grands défis du soignant migrant lors de son arrivée dans le système de soins québécois ?
  • Quels sont les plus grands défis du système global québécois face à ces soignants ?
  • S’il fallait changer et/ou conserver deux éléments de l’ensemble du système actuel, quels seraient-ils

 

Marie-Jeanne Blain, anthropologue, et Frédéric J Doucet, avocat au Tribunal des droits de la personne, ont été nos experts dans cette discussion sur les soignants migrants. Marie-Andrée Girard, anesthésiologiste et doctorante en droit, animait la discussion.

En prenant l’exemple des médecins diplômés à l’étranger, Mme Blain souligne d’entrée de jeu la problématique d’avoir des statistiques fiables sur le sujet puisque tous les soignants ne sont pas nécessairement comptabilisés en n’ayant pas accès au système de reconnaissance professionnelle pour de multiples facteurs (désemployabilité, barrière de langue, arrivée sur un autre statut que celui de professionnel migrant…). Aussi, elle souligne la problématique de la multiplication des acteurs qui travaillent en vase clos et qui se « renvoient la balle » lors du processus. Le manque de cohérence et la dilution des responsabilités ont un impact certain sur les soignants migrants. En plus de ce souci, le manque de rétroaction à l’occasion du processus d’évaluation et de choix des stages est aussi une limite pour les soignants migrants : comment maximiser l’employabilité si les soignants ne peuvent avoir de rétroactions sur l’évaluation de leur dossier par les diverses instances décisionnelles ?

 

Me Doucet a proposé un éclairage juridique à la problématique. Dans le cadre de sa thèse, il a eu l’opportunité de faire des entrevues de responsables des ordres professionnels sur le sujet de la protection du public. Il souligne l’importance que donnent les ordres à la spécificité de l’organisation de travail des professionnels ainsi qu’au degré d’autonomie de leurs membres. Ces critères teintent souvent l’évaluation des dossiers par les ordres. Aussi, il souligne la difficulté pour les soignants migrants d’obtenir des stages en raison des structures pédagogiques (cours prérequis) et de la rareté des stages, qui sont principalement occupés par les étudiants québécois.

 

Pour résumer la discussion avec les participants, nous pouvons mettre de l’avant que la multiplication des acteurs avec des critères différents cause beaucoup de retard et de frustration chez le soignant migrant. Aussi, la sommation des obstacles présents dans les systèmes professionnel et d’éducation dans leur ensemble pourrait être qualifiée de discrimination systémique, en plus de la discrimination à l’embauche, phénomène reconnu par les ordres professionnels et le tribunal des droits de la personne. D’un point de vue positif, nos experts notent que les expériences personnelles des décideurs influent souvent sur leur capacité d’évaluer correctement les expériences du soignant migrant.

 

Finalement, les participants aimeraient voir s’implanter des pratiques exemplaires comme les pratiques helvétiques qui décident d’intégrer les médecins migrants en permettant un mentorat entre un médecin travaillant dans le système de santé local et le soignant migrant. Le souci d’implanter au Québec une telle pratique sera la gestion et le financement de ces postes « mentorés ». Les participants soulignent en terminant deux points : l’absence de représentation des médecins diplômés à l’étranger sur la majorité des instances déterminant le devenir des soignants migrants et la difficulté que représentent les procédures devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) sur les aspects de la discrimination en raison des délais, de la difficulté de localiser la responsabilité et des peurs de représailles.

 

Le H-POD remercie les conférenciers pour leur riche contribution et les participants pour avoir participé activement aux discussions.

 

Ce contenu a été mis à jour le 13 décembre 2018 à 14 h 22 min.

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